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 «La Palme de l’Oasis 15» A l’occasion de la fête de la Jeunesse, Durabilité et gouvernance des territoires : Le Maroc à la croisée des chemins !

En tant qu’expert, je me prononce pour définir sur l’analyse de la décennie à venir 2025-2035, que le Maroc ne pourra pas se satisfaire d’une simple liste d’opportunités. Mais qu’elle doit impérativement confronter la puissance de la vision stratégique du Royaume à la complexité des, et de ses défis internes. Le pays présente en effet aujourd’hui une double réalité : celle d’un « Maroc qui avance », porté par des projets d’envergures mondiales, et celle d’un « Maroc qui peine », confronté à des freins structurels profonds.

La réussite du premier est intrinsèquement liée à la capacité de surmonter les obstacles du second.

Une stabilité stratégique face à une fragilité sociale interne

L’ambition résidant dans celle d’être « un hub de stabilité incontournable », en ce sens que l’on peut affirmer que le Maroc a brillamment capitalisé sur sa stabilité politique pour se forger un rôle de partenaire sécuritaire et économique incontournable. Ce statut de « pays-pont« , fiable et proactif (lutte anti-terroriste, gestion migratoire), est devenu ainsi un atout géopolitique majeur. Il rassure les investisseurs et a positionné le Royaume comme une plateforme de « délocalisations d’activités », pour une Europe en quête de chaînes d’approvisionnements sécurisées.

Ce socle de stabilité est la pierre angulaire de son attractivité.

Par contre une controverse risque résulter d’une Vision « Top-Down » trop affirmée, les bénéfices peinant à en irriguer la base !

Car en effet, cette stabilité macroéconomique relative masque des fragilités internes. La stratégie marocaine étant largement impulsée par le sommet de l’État (« Top-Down », ce qui garantit une exécution rapide des grands projets aboutit à ce revers de cette médaille qui est et qui fait que les bénéfices peinent à irriguer équitablement toutes les couches de la société (« Bottom-Up » urbain et rural).

En cela le risque principal étant que la prospérité générée par les grands hubs d’industrialisation, d’exportations, des hubs agro-alimentaires, ne se diffuse pas suffisamment, alimentant ainsi de manières irrévocables un sentiment de décalage et de tensions sociales latentes qui pourraient, à terme, fragiliser l’édifice.

La convergence des projets structurants face aux murs du réel !

Les grands projets ne peuvent être analysés sans considérer les contraintes du terrain sur lequel ils se déploient et ceux pour lesquels rien ne se réalise.

Les infrastructures : Le TGV – la RAM – l’Industrialisation – l’Agriculture – le Tourisme et la fracture territoriale

  • Le programme autoroutier, l’extension du TGV vers Agadir et le renforcement de la flotte de la RAM pour la CAN 2025 et la Coupe du Monde 2030 dessinent les contours d’un hub logistique et touristique de premier plan. L’objectif de connectivité maximale est clair.
  • Cette modernisation spectaculaire met en lumière la fracture structurelle entre l’urbain et le rural. Pendant que le « Maroc utile » se dote d’infrastructures de classes mondiales, une grande partie du monde rural reste enclavée, avec un accès limité aux services de base (santé, éducation, eau). Cette dichotomie crée un Maroc de plus en plus décalé, source d’inégalités profondes et freins aux développements inclusifs.

Les puissances industrielles et énergétiques : L’ambition face au mur de l’eau

  • Le Maroc n’est plus un simple assembleur. Avec l’OCP qui pivote vers les engrais et l’ammoniac vert, des écosystèmes automobile/aéronautique (Tanger-Kénitra-Casa/Nouaceur) qui visent la production de véhicules électriques, le secteur aérien et une expertise reconnue dans les énergies renouvelables, (MASEN) ouvrant la voie à une filière d’hydrogène vert, le pays construit ainsi très certainement une base industrielle souveraine et tournée vers l’avenir.
  • L’ensemble de cette ambition industrielle et énergétique se heurte de plein fouet au « talon d’Achille » du Maroc : « le stress hydrique structurel ». L’exploitation minière (phosphates, cobalt), l’agriculture d’exportation (qui soutient l’agro-industrie) et surtout la production d’hydrogène vert par électrolyse sont extrêmement gourmandes en eau. La politique des barrages est loin d’avoir convaincu, la solution du dessalement d’eau de mer, bien que vitales, posent une question de justice sociale ! Le risque est de créer une « eau à deux vitesses », une eau coûteuse mais garantie pour l’industrie exportatrice et le tourisme, et puis une eau rare et rationnée pour les petits agriculteurs et les citoyens, exacerbant les tensions.

Les secteurs classiques : La modernisation et ses « dommages collatéraux »

  • Les secteurs traditionnels comme la banque, le BTP, le commerce et les matières premières sont les piliers qui soutiennent cette transformation. Les banques financent l’expansion, le BTP construit les infrastructures, le commerce se modernise.
  • Chaque secteur porte ses propres risques. Les banques, très concentrées, peinent à assurer une inclusion financière du monde rural et de l’informel. La modernisation de la distribution écrase le petit commerce de proximité. Le BTP est dépendant de la commande publique. Et les matières premières exposent le pays à la volatilité des marchés mondiaux.

Un futur conditionné par la gouvernance et le capital humain

L’ambition : Un hub financier africain et une économie décarbonée (2025-2030). La prochaine décennie verra la concrétisation de ces projets. Pour Casablanca Finance City (CFC), les opportunités sont immenses celles de devenir le hub de la « finance verte », structurer le financement des mégaprojets d’infrastructures et attirer le capital-investissement pour les écosystèmes industriels.

La vision est de faire de CFC le bras armé financier d’une économie marocaine reconnue comme le leader en Afrique. Comment ne pas penser ce frein ultime qui réside encore et toujours dans cette inertie administrative et le déficit de compétences ?  Cette brillante vision financière et technocratique pourrait facilement se gripper par ce « frein sous-jacent » : un défaut de gouvernance face à la scabilité du quotidien !

Le Maroc dispose d’une élite administrative de haut vol (OCP, MASEN, etc.), mais l’administration locale (communes, services déconcentrés), celle qui est au contact des citoyens et des PME, souffre de lourdeurs, d’un manque de compétences et de transparences. Ce décalage entre la vitesse de la tête stratégique et l’inertie du corps administratif reste un obstacle majeur.

Sans une réforme profonde de l’administration et un investissement massif dans le capital humain (formation, éducation, reconversion professionnelle), le risque est double :

*- Celui que les projets ne se déploient pas efficacement sur tout le territoire.

*- Celui qui fait que la population ne disposera pas des compétences nécessaires pour occuper les nouveaux emplois qualifiés, créant ainsi de nouvelles formes d’exclusions !

C’est en cela que les alertes du CESE, de la Fondation Friedrich NAUMANN et de l’Arab BAROMETER dressent ce même constat comme quoi les jeunes pour le moment, qui représentent 16.9% (2021)de la population, ne sont pas non seulement intégré (avec à peine 1%), cela bien que la scène partisane n’ait jamais été aussi large, qu’en ces conditions elle n’a jamais semblé aussi peu attractive pour la jeunesse.

La défiance est profonde. Les jeunes désertent les mécanismes institutionnels de participations – d’inscriptions sur les listes électorales, votes, signatures de pétitions, conseils consultatifs – mais se mobilisent autrement, « via les réseaux sociaux ». Ils sont politisés, mais hors des cadres traditionnels, donnant naissance à un activisme numérique qui échappe aux canaux institutionnels.

Comment alors transformer cette mobilisation digitale en engagement citoyen concret ?

*-La réponse ne pouvant être que par l’inclusion. Or, la réalité sociale et économique agit jusqu’à nos jours en ces conditions comme un puissant facteur de désengagements !

Durabilité et gouvernance !

Bien que la stratégie de développement du Maroc pour 2025-2035 soit cohérente, ambitieuse et dotée d’atouts indéniables. Le potentiel de croissance et de transformation est réel car affirmé, cependant :

*- la réussite de ce modèle n’est pas acquise !

*- elle reste suspendue à la capacité du royaume à mener de front la bataille de la modernisation économique et celle plus complexe, de l’inclusion sociale et de la réforme de l’État par l’application réelle de la régionalisation avancée dans un contexte culturel immatériel et vernaculaire.

Aussi et plus que jamais il doit être admis que le véritable défi pour le Maroc n’est plus seulement :

*- de savoir concevoir des plans visionnaires, mais bien celui de s’assurer que la formidable énergie du « Maroc qui avance » serve à tirer vers le haut et à transformer durablement le « Maroc qui peine ». *- que les résolutions des problématiques de l’eau, de la fracture territoriale, de la gouvernance locale et du capital humain ne sont pas une option :

  • « MAIS QU’ELLES SONT LES CONDITIONS SINE QUA NON DE LA REUSSITE DE SES PROJETS DE DEVELOPPEMENTS ! »

En cela Sa Majesté le Roi Mohammed VI vient de le rappeler dans son discours de ce 30 Juillet 2025 :

« « Le Maroc a dépassé, cette année, le seuil de l’Indice de Développement Humain (IDH), pour se classer désormais dans la catégorie des pays à « DEVELOPPEMENT HUMAIN ELEVE », mais il est regrettable de voir que certaines zones, surtout en milieu rural, endurent encore des formes de pauvreté et de précarité, du fait du manque d’infrastructures et d’équipements de base. Cette situation ne reflète en rien Notre vision de ce que devrait être le Maroc d’aujourd’hui. Elle ne donne pas non plus la pleine mesure des efforts que nous déployons pour renforcer le développement social et réaliser la justice spatiale !

De fait, il n’y a de place, ni aujourd’hui, ni demain,

pour un Maroc avançant à deux vitesses. » »

En tant qu’Association Marocaine de Développement du Géoparc Jbel Bani (AMDGJB) autorisée sous le N°1954-36 depuis le 10 Avril 2015 qui gère le Territoire Soutenable du Géoparc Jbel Bani (TSGJB), nous positionnant en tant que « Pôle de Compétitivité », nous n’aurons eu de cesse d’alerter provincialement, régionalement depuis une dizaine d’années sur ces constats et ne pouvons que confirmer ces manquements ruraux flagrants de non créations des structures pouvant créer l’emploi, des seules formations sujettes à faire partir les jeunes fautes de structures répondant aux besoins, bien qu’ayant toujours été persuadés de ces nombreuses autres solutions possibles que nous aurons à maintes reprises proposées et, en ces conditions confirmées, sans avoir à ce jour, malheureusement été écoutés !

Patrick SIMON – 21 Août 2025 La Palme de l’Oasis N°15